La CIDE: comprenons-nous bien!

     
Enfant, Jouer, Étude, Couleur, Apprendre
Dans le cadre de la conception de notre "Pack démarrage IEF", nous nous sommes penché(e)s sur les textes fondateurs du droit de l'enfant à l'instruction, car citer un article de loi pour faire valoir un droit face à un inspecteur d'académie ou un maire, c'est faire référence à un texte complet
Le Collectif propose une réflexion autour de la Convention Internationale des Droits de l'Enfant (CIDE) afin d’essayer de mieux comprendre l’esprit dans lequel elle a été adoptée et ses possibles interprétations dans le cadre de l’instruction en famille.

A la naissance d’un enfant, les parents se voient confier la tâche de le protéger, de l’éduquer et de prendre les décisions qui s’imposent pour lui. L’enfant étant dépendant, ce sont ses parents qui devront décider, à sa place, du meilleur cadre dans lequel ils souhaitent l’éduquer. Le lieu de vie, la façon de vivre et la structure dans laquelle il évoluera, dépendent en grande partie du niveau de vie et des choix éducatifs de ses parents. Les enfants naissent égaux mais leur avenir est intimement lié à leurs conditions de vie et à l’éducation qu’ils auront. C’est pour défendre les droits de tous les enfants dans le monde qu’une Convention Internationale pour les Droits de l’Enfant (CIDE) a été adoptée par l’ONU en 1989. Cette convention veut assurer une protection aux enfants du monde en 54 articles convenus par les pays signataires qui l’ont ratifiée. Ratifier signifie « approuver, confirmer ce qui a été dit ou fait, le reconnaître comme vrai ou comme valide ». Cent quatre-vingt-quinze pays ont ratifié la CIDE. La France compte parmi les pays signataires.

Deux articles de la CIDE sont consacrés au droit à l’éducation des enfants, soit les articles 28 et 29 .

Article 28:
1) Les États parties reconnaissent le droit de l’enfant à l’éducation, et en particulier, en vue d’assurer l’exercice de ce droit progressivement et sur la base de l’égalité des chances :
a - ils rendent l’enseignement primaire obligatoire et gratuit pour tous ;
b - ils encouragent l’organisation de différentes formes d’enseignement secondaire, tant général que professionnel, les rendent ouvertes et accessibles à tout enfant, et prennent des mesures appropriées, telles que l’instauration de la gratuité de l’enseignement et l’offre d’une aide financière en cas de besoin ;
c - ils assurent à tous l’accès à l’enseignement supérieur, en fonction des capacités de chacun, par tous les moyens appropriés ;
d - ils rendent ouvertes et accessibles à tout enfant l’information et l’orientation scolaires et professionnelles ;
e - ils prennent des mesures pour encourager la régularité de la fréquentation scolaire et la réduction des taux d’abandon scolaire.

2) Les États parties prennent toutes les mesures appropriées pour veiller à ce que la discipline scolaire soit appliquée d’une manière compatible avec la dignité de l’enfant en tant qu’être humain et conformément à la présente Convention.
3) Les États parties favorisent et encouragent la coopération internationale dans le domaine de l’éducation, en vue notamment de contribuer à éliminer l’ignorance et l’analphabétisme dans le monde et de faciliter l’accès aux connaissances scientifiques et techniques et aux méthodes d’enseignement modernes. A cet égard, il est tenu particulièrement compte des besoins des pays en développement.

Article 29:
1) Les États parties conviennent que l’éducation de l’enfant doit viser à :
a - favoriser l’épanouissement de la personnalité de l’enfant et le développement de ses dons et de ses aptitudes mentales et physiques, dans toute la mesure de leurs potentialités ;
b - inculquer à l’enfant le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales, et des principes consacrés dans la Charte des Nations Unies ;
c - inculquer à l’enfant le respect de ses parents, de son identité, de sa langue et de ses valeurs culturelles, ainsi que le respect des valeurs nationales du pays dans lequel il vit, du pays duquel il peut être originaire et des civilisations différentes de la sienne ;
d- préparer l’enfant à assumer les responsabilités de la vie dans une société libre, dans un esprit de compréhension, de paix, de tolérance, d’égalité entre les sexes et d’amitié entre tous les peuples et groupes ethniques, nationaux et religieux, et avec les personnes d’origine autochtone ;
e - inculquer à l’enfant le respect du milieu naturel.
2) Aucune disposition du présent article ou de l’article 28 ne sera interprétée d’une manière qui porte atteinte à la liberté des personnes physiques ou morales de créer et de diriger des établissements d’enseignement, à condition que les principes énoncés au paragraphe 1er du présent article soient respectés et que l’éducation dispensée dans ces établissements soit conforme aux normes minimales que l’État aura prescrites.


La CIDE par ces deux articles précise sans aucun doute possible que les Etats doivent garantir à chaque enfant le droit à l’éducation et tout mettre en œuvre pour les assurer de ce droit et de la qualité de l’enseignement.

Ces deux articles spécifiques de la CIDE ont d’ailleurs conduit à l’adoption d’une Déclaration qui a été signée par 155 pays en 1990, soit la Déclaration mondiale sur l’éducation pour tous,  et cadre d’action pour répondre aux besoins éducatifs fondamentaux. Cette déclaration s’est fixée six objectifs :
1)  L’accès universel à l’éducation
2)  Mettre l’accent sur l’équité
3)  Mettre l’accent sur les résultats d’apprentissage
4)  Elargir les moyens et la portée de l’éducation de base
5)  Améliorer l’environnement d’apprentissage
6)  Et renforcer les partenariats pour 2000 (Cependant rappelons qu’en 2000 les objectifs n’étaient pas atteints).
S’appuyer sur la CIDE afin  de garantir son droit à exercer librement l’instruction en famille s’avère une décision hasardeuse parce que celle-ci spécifie formellement en l’article 29 au point 2 que l’Etat prescrit les normes minimales en matière d’éducation
En tout état de cause, la CIDE encourage à considérer l’intérêt supérieur de l’enfant avant toute chose. Etant donné que les articles 28 et 29 préconisent de rendre obligatoire l’enseignement primaire pour tous et que la Déclaration mondiale sur l’éducation pour tous (issue de la CIDE) met l’accent sur les résultats de l’apprentissage (objectif 3 de la Déclaration), il apparaît problématique de s’y référer pour justifier le non enseignement et la volonté de soustraire son enfant à toutes formes d’évaluation lors des inspections.

Il est fréquent que les parents se voient conseiller d'invoquer l'article 9 de la CIDE lorsqu’ils désirent ne pas être séparés de leur enfant lors des contrôles. Or cet article a été rédigé en faisant référence à un contexte très différent d’une inspection de l’académie qui ne représente en aucun cas un risque pour la sécurité de l'enfant
En effet, l'article 9 précise le droit de l’enfant à ne pas vivre séparé de ses parents ou de l’un de ses parents contre leur gré sauf si la sécurité de l’enfant est menacée (maltraitance, négligence). En ce cas, l’intérêt supérieur de ce dernier sera observé. L'article 9 ne peut donc pas être invoqué pour une brève séparation à l'occasion d'un contrôle de l'inspection. En revanche, les parents qui ne souhaitent pas être séparés de leur enfant pourront plus judicieusement s'appuyer sur l'art. R. 131-14 du décret paru en octobre 2016 et sur l'article 371-1 du Code Civil (Modifié par LOI n°2013-404 du 17 mai 2013 - art. 13).
 
La CIDE est une convention qui constitue un ensemble. Notre réflexion nous conduit à penser que nous ne pouvons y faire notre marché en sélectionnant des phrases qui plaident notre cause tout en ignorant d’autres clauses qui contredisent nos revendications

Brandir la CIDE comme la Liberté au sein nu, c'est, nous semble-t-il, accepter les responsabilités, les droits et les devoirs que le texte impose aux responsables légaux de l'enfant et aux États parties.


  
     

Article conçu, réfléchi et rédigé par les membres du Collectif l'Ecole est la Maison
PHOTO : Pixabay-libre de droits

Commentaires